M. Colloghan

samedi 22 décembre 2012

Chiapas : Déclaration de l'EZLN


“Vous avez entendu ? C'est le bruit de votre monde qui s'écroule” : EZLN

(Traduction par Xochilanga)

Chiapas, Mexique. Des dizaines de milliers de bases d'appui de l'Armée Zapatiste de Libération Nationale (EZLN) ont occupé dans un silence emblématique les rues de cinq municipalités chiapanèques, dans la première manifestation publique que font les zapatistes depuis le 7 mai 2011, quand ils se sont joints à l'appel du Mouvement pour la Paix avec Justice et Dignité. Cette action simultanée et massive, la plus grande de toute son histoire, a été précédée par l'annonce que l'organisation indigène allait donner sa parole, qui a été rendue publique quelques heures après la mobilisation.

“À qui de droit. Vous avez entendu ? C'est le bruit de votre monde qui s'écroule. C'est celui du nôtre qui resurgit. Le jour où le jour fut, c'était la nuit. Et ce sera la nuit le jour où ce sera le jour.” est le message signé par le sous-commandant Marcos et diffusé quelques heures après, sur le site internet Enlace Zapatista.

Dans chacune des villes occupées (Ocosingo, Las Margaritas, Palenque, Altamirano et San Cristóbal) les tzeltales, tzotziles, ch’oles, tojolabales, zoques, mames et métisses ont marché avec leurs traditionnels foulards et passe-montagnes, en rang et dans un silence absolu. Hommes et femmes, jeunes en majorité, sont passés sur une estrade dans chaque ville en levant le poing. Ça a été l'expression la plus symbolique de toute la mobilisation.

Force, discipline, ordre extraordinaire, dignité, courage, cohésion. Ce n'est pas rien. Ce sont 19 années pendant lesquelles une infinité de fois on les a donnés pour morts, pour divisés ou isolés. Une fois après l'autre, ils sortent pour dire “nous sommes là”. Aujourd'hui, avec 40000 zapatistes dans les rues, ils ont à nouveau fait taire fermement les rumeurs et les mensonges.

À San Cristobal de las Casas, ville où traditionnellement se font les manifestations de l'EZLN en dehors de son territoire, plus de 20000 hommes et femmes zapatistes, venant du caracol d'Oventik, et où ils se sont rassemblés un jour avant, ont défilé sous une pluie qui a commencé à l'aube. La marche de 28 détachements (selon la numérotation que les groupes portaient sur leurs passe-montagnes), a commencé aux abords de la ville, vers 8h30 du matin, et vers midi, l'arrière-garde était encore très loin de centre. La place était trop petite pour les recevoir.

Habitants et touristes ont lancé des cris de soutien et ont chanté l'hymne zapatiste à certains endroits. Les commerces, comme d'habitude, ont baissé leurs rideaux, puisque de nouveau, les indiens les ont surpris. L'estrade se trouvait devant la cathédrale, tandis que les groupes ordonnés de zapatistes se trouvaient autour du premier carré de la ville.

À Palenque, ancienne ville ch’ol et un des centres touristiques les plus importants de l'État, les indigènes zapatistes sont entrés par l'avenue principale de la ville et ont levé le poing sur l'estrade placée dans le centre de la ville, en face de l'église. Ensuite, ils sont repartis par la rue Chiapas pour retourner dans leurs communautés.

À Las Margaritas, les zapatistes ont répété la dynamique avec 7000 bases d'appui, pendant qu'à Ocosingo – ville aussi prise par les insurgés le 1er janvier 1994 et où a eu lieu le massacre de civiles par l'armée fédérale dans les premiers jours de la guerre – plus de 6000 bases d'appui ont déployé l'action dès 6h du matin, et on a su que près de 8000 zapatistes de plus seraient restés au caracol de la Garrucha par manque de moyen de transport pour rejoindre la ville. Autant de zapatistes ne s'étaient pas concentrés dans cette ville depuis les combats sanglants du soulèvement indigène.

Les symboles sont nombreux, puisqu'ils ont choisi le dernier jour du cycle maya, celui qui pour beaucoup devrait être « la fin du monde » et pour d'autres, le début d'une nouvelle ère, le changement de peau, la rénovation. Pendant ces 19 ans, le parcours de la lutte zapatiste a été rempli de symbolismes et de prophéties, et cette occasion ne devrait pas être une exception.

Depuis l'annonce que prochainement, le commandement général de l'Armée Zapzatiste de Libération Nationale (EZLN) donnerait à connaître sa parole, l'expectative sur le contenu du message a été grandissante. Ce vendredi, cependant, ce qui a été entendu, ce sont leurs pas, leur cheminement silencieux sur les cinq places, leur marche digne et rebelle dans les rues et leurs poings levés.

La dernière fois que le sous-commandant Marcos, chef militaire et porte-parole zapatiste a parlé, c'était dans un échange épistolaire avec le philosophe Luis Villoro, le 7 décembre 2011. Et l'initiative politique la plus récente a été le festival de la Digne Rage, auquel ils ont convoqué les luttes et les mouvements du Mexique et du monde, en décembre 2008.

Ce vendredi, les membres du Comité Clandestin Révolutionnaire Indigène ne se sont pas présentés, comme ils l'ont fait en mai 2011. Ça a été la dernière fois qu'ont été vus Tacho, Zebedeo, Esther, Hortencia, David et le reste du commandement général, à l'exception du sous-commandant Marcos, qui s'est maintenu éloigné de la scène publique.


Vidéo
Sans paroles, la marche des zapatistes

Photos: Moysés Zúñiga, Víctor Camacho et Rompeviento TV
Production: Clayton Conn

Images des mobilisations que les bases d'appui de l'Armée Zapatistes de Libération Nationale (EZLN) ont effectué dans les villes d'Ocosingo, Las Margaritas, San Cristóbal de las Casas, Altamirano et Palenque.

skype: desinformemonos

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