M. Colloghan

mardi 31 mai 2011

Catalogne : le Mouvement « Démocratie réelle maintenant ! » résiste et se renforce


Richard Neuville s'est rendu en Catalogne pour y observer le mouvement en cours.


Ils ne pourront pas déloger nos rêves

Chronique du 27 mai : Au nom du football quasiment invoqué comme raison d’état, la police détruit les campements… et tente d’évacuer els indignats de Barcelona et de Lleida.
Le 27 mai, à partir de 6 heures 30 du matin, les Mossos d’esquadra ont investi le campement du M-15 installé sur Plaça Catalunya à Barcelone. L’ordre est venu du conseiller à la sécurité de la Generalitat (dirigée depuis 2010 par Convergencia i Unio – parti de la bourgeoisie nationaliste), qui a utilisé le prétexte de « nettoyer » la place en vue du rassemblement prévu le 28 au soir sur cette même place, en cas de victoire du Barca en finale de la coupe d’Europe de football. Il n’y a pas eu de  résistance violente de la part des occupants qui se veulent pacifiques mais beaucoup de détermination. 

La police a détruit l’ensemble des stands mis en place depuis une semaine et demie. 120 blessés ont été dénombrés car la police a largement utilisé les matraques et les balles en caoutchouc. Tout le campement a été détruit et la police a laissé un champ de « ruines » et la place dans un état déplorable. Elle a seulement emmené ce qui l’intéressait (les ordinateurs, le matériel audio-visuel et des documents). Très rapidement, l’évacuation a provoqué un rassemblement de solidarité. Très tôt, la CGT (syndicat révolutionnaire) a donné l’ordre d’encercler la police. Des milliers de personnes accourent pour exprimer leur solidarité. Vers midi, la police doit se retirer. La même opération a eu lieu simultanément à LLeida, Plaça del Castell.

L’après-midi même, les jeunes ont réinvesti les places pour les nettoyer et commencer à réinstaller les campements. Le soir, des manifestations de protestation ont eu lieu le soir dans tout l’Etat espagnol. A Barcelone, une douzaine de milliers de personnes y a participé.

A Girona où nous sommes arrivés hier soir, la manifestation a rassemblé plusieurs centaines de personnes devant le siège provincial de la Generalitat. Non loin de là (Plaça Catalunya), est installé le campement totalement autogéré par les jeunes que nous avons visité. On y trouve : un point d’information qui accueille les passants et les visiteurs, on y apprend que 700 campements et assemblées sont recensés dans le monde ; une immense tente où est installé le comedor popular (cantine populaire) et plusieurs stands qui proposent des activités. Le campement tient une assemblée générale régulière, diverses commissions ont été formées : diffusion, logistique, activités, contenus, etc. Hier soir, vers minuit, tandis qu’un groupe débattait de l’organisation du lendemain, deux artistes proposaient un récital improvisé et d’autres jeunes installaient de nouvelles tentes. L’ambiance était très calme, le lieu exprime une grande tolérance et un certain pacifisme. On s’écoute attentivement, on se respecte. Nous n’avons croisé que peu de militant-e-s. De nombreux panneaux et autres banderoles ornent l’espace « récupéré ». Certains slogans se veulent radicaux, d’autres peuvent apparaître naïfs. La corruption, le pouvoir de l’argent et des banquiers et le besoin de plus de démocratie sont les thèmes les plus présents.
Politiciens, banquiers, nobesse et clergé, A la poubelle !

Nous doutons que les médias français aient diffusé les propos tenus pas Sarkozy lors du G8 à Deauville mais ils ont été largement repris par les médias espagnols. Celui-ci a salué le printemps arabe et s’est félicité que les jeunes se soient débarrassés de leurs dirigeants en Tunisie et en Egypte mais pour mieux s’étonner du printemps espagnol « dans un pays où les jeunes sont en démocratie ». Notre cher président devrait venir voir des campements et il comprendrait mieux que ce que les jeunes contestent, se sont précisément les politiques d’austérité et néolibérales mises en œuvre par le G8, les institutions internationales et européennes et la démocratie par délégation...


Chronique du 28 mai : Le campement de Barcelone se consolide et l’assemblée adopte la poursuite du campementVingt-quatre heures après l’échec de la tentative d’évacuation de l’Acampada de  Plaça Catalunya, le réaménagement de l’espace a bien avancé, les stands des différentes commissions sont construits de bric et de broc, de matériaux recyclés, etc. Certaines banderoles ont pu être récupérées. Beaucoup de jeunes et de différentes générations s’affairent à redonner un aspect convivial à la place. Plusieurs commissions réunies en cercles occupent les différents espaces. Chacun-e peut intervenir, les prises de paroles sont brèves, il n’y a pas d’applaudissements, d’un signe des mains, on approuve ou pas les échanges et les décisions. Une longue queue s’étire déjà devant le comedor popular pour se nourrir.


Tout au long de l’après-midi, l’animation se poursuit dans l’espace autogéré : on reconstruit les différents stands thématiques, on se réunit en commission ou en forum thématiques, on s’occupe du jardin légumier, les enfants sont accueillis à la crèche, des groupes de musique se produisent tandis que deux jeunes pédalent pour alimenter l’électricité nécessaire à la sonorisation. Certains ont décidé de dormir dans les arbres et ont aménagé leur couchage aves des planches et des cordes. Au fur et à mesure du temps, l’affluence grossit. Certain-e-s viennent par curiosité, d’autres pour témoigner leur soutien.

A 19 heures, la place est noire de monde, l’assemblée peut commencer. Il y a entre 5 000 et  6 000 personnes. Les différentes commissions (une quarantaine) font des rapides compte rendus et soumettent ou non des propositions. Si les débats en commission n’ont pas été suffisants, les propositions ne sont pas présentées. On apprend que des campements s’installent dans les quartiers et dans les villes populaires de la banlieue de Barcelone. Le mouvement évolue, en passant de « l’indignation » autonome à un caractère nettement plus radical. Ce soir, il s’agit également de prévenir les tentatives d’incursion des supporters du Barca. La municipalité a donné pour consigne aux supporters de se rassembler à l’Arc de triomphe mais les habitudes ont parfois la vie dure. Il est nécessaire de s’organiser pour éviter l’envahissement de la place et la destruction de l’espace.
Comme prévu, si 25 000 supporters se concentrent bien à l’Arc de triomphe, il y en a autant voire plus à proximité de Plaça Catalunya. Les indigné-e-s réussiront cette fois à protéger leur campement en créant une barrière humaine tout autour de la place et, avec le concours objectif de la police qui s’interposera en utilisant de nouveau la matraque contre certains supporters violents.
A 2 heures 30 du matin, le calme est revenu. Un peu plus tard, la place est remplie de sacs de couchage.
A Girona, dans la journée, la police a demandé aux occupants de plier les tentes et d’enlever les banderoles afin que le rassemblement des supporters du Barca puisse se dérouler dans de bonnes conditions. Le campement s’est replié sur le centre de la place et il n’y a pas eu d’incidents.
Dimanche 29 mai après-midi, Paco Ibañez doit venir soutenir els indignats.

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(Photos RN)

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